Il suffit de passer le pont
Coucou, chères lectrices, après un petit arrêt, je reviens auprès de vous : allez, mettez vos chaussures de marche et accompagnez-moi pour une promenade au bord de la rivière !
Vous voulez faire une jolie balade de printemps ? Alors, aux premiers beaux jours, prenez la départementale à la sortie du village et roulez quelques kilomètres : après le petit pont, tournez à droite et abandonnez votre voiture sur le parking. Comment, vous n'avez pas vu le pont ? C'est que la route qui le recouvre le fait oublier, il faut être en bas pour le découvrir...
Incroyable, n'est-ce pas, ce petit pont en grès des Vosges, comme le lion de Belfort !
La rivière qui passe en dessous s'appelle "la Madeleine".
Laissant le pont dans votre dos, votre petit chien sur les talons, empruntez le chemin forestier : dès que vous vous serez éloignées de la route, vous serez frappées par le calme qui règne dans la forêt.
Marchez tranquillement, laissez votre chien flairer et gratter comme il en a envie. Et vous, du coin de l’œil, guettez les oiseaux qui volettent d'un arbre à l'autre ; surprenez un craquement de branche, observez les petites fleurs qui ornent le bord du chemin. Au début, vous croirez qu'elles sont toutes les mêmes, mais pas du tout, plusieurs familles sont déjà au rendez-vous des beaux jours en ce mois de mars.
Continuez tout droit, sans vous laisser tenter par les allées de traverse qui croisent le chemin forestier. C'est difficile, bien sûr, on est attiré par les rayons du soleil qui filtrent entre les troncs, on sent qu'on rate un beau parcours, que peut-être c'est par là, à gauche, qu'on devrait se rendre... Ah, comme c'est douloureux de devoir choisir...
Mais faites-moi confiance, suivre le chemin principal est la meilleure option pour notre promenade d'aujourd'hui. Et oui, regardez, nous voilà récompensées : le chemin descend doucement vers la rivière et la rejoint. Ce n'est plus du tout un chemin forestier carrossable, mais juste un sentier qu'un petit pont de bois emmène plus loin.
Viens avec nous, petit chien ! Cette fois, nous ne franchissons pas le pont de bois : nous prenons la sente à droite juste avant et nous remontons la rivière qui s'écoule nonchalamment entre les arbres.
Retournez-vous et observez le pont : il semble devenu irréel... Serait-il en train de disparaître ?
Je me souviens d'un cours de philo quand j'étais en terminale : le professeur essayait de nous convaincre que les objets n'avaient d'existence qu'au moment où notre regard se posait sur eux. Moi, jeune et pragmatique, je trouvais cette pensée complètement absurde (inutile de vous dire que je n'étais pas l'élève la plus douée de la classe !)
A présent, je serais moins catégorique... Commencerais-je à vieillir?
Nous n'entendons que l'eau qui fredonne sur les pierres, le frottement de nos pas sur la piste, quelques cris d'oiseaux, parfois le claquement d'un poisson jaillissant pour gober un insecte imprudent.
Le petit chien s'élance, tout excité : sans doute a-t-il senti la présence d'un animal qui a fui en nous entendant. Il fixe la berge sombre, où plus rien ne bouge. Je regarde moi aussi avec attention, mais je ne vois rien. Un rat musqué, peut-être ?
Reprenons notre sentier qui serpente dans la forêt, suivant les méandres de l'eau. La rivière s'écoule paresseusement, et, quand par endroit elle s'étale sans vergogne, on aperçoit les cailloux du fond.
Elle contourne les arbres dont elle dénude les racines. Des troncs, des branches l'obligent à se glisser en dessous, sur les côtés. Rien ne parvient à arrêter son flux régulier.
On imagine se coucher dans une barque et la laisser nous emporter, sans retour, sans regrets.
Un peu plus loin, écoutez comme elle s'agite ! C'est que des pierres lui font barrage. Elle s'élance au-dessus, elle glisse, elle court : elle semble s'amuser follement ! Dès l'obstacle franchit, elle redevient sage et calme, comme si de rien n'était, la trompeuse...
Jetez un coup d’œil sur votre droite : pour accueillir joyeusement le printemps, la forêt a déroulé son tapis fleuri, on croirait qu'il a neigé !
Si vous êtes fatiguées, prenez le temps de vous asseoir un moment au salon des fées, s'il est libre ( ce qui est le cas la plupart du temps, car je suppose qu'elles le fréquentent à d'autres heures que les humains ) : ne parlez pas, ne bougez pas, goûtez la musique de la forêt, emplissez-vous de la quiétude des lieux.
Et repartez revigorées, capables soudain de partager pour un moment la folle insouciance et le bonheur sans ombre de votre petit compagnon à quatre pattes. Suivez la piste au bord de l'eau, jusqu'à ce que vous rejoigniez le pont dit "Napoléon", qui semble attendre en toute confiance votre retour.
Là, vous pouvez reprendre votre voiture et revenir à la civilisation...
Merci de m'avoir accompagnée, j'espère que la promenade vous a plu !
Comment ? Vous avez aperçu un étang de l'autre côté du pont ? Vraiment ?
Eh bien ça sera le but d'une prochaine balade, si vous en avez envie !
A bientôt, chères amies !